Saturday, August 3, 2013

En route vers la Cassiar Highway

Samedi 27 juillet

Le départ du Mont Robson est un peu gâché par le restaurant du parc, qui annonçait que le petit-déjeûner est servi jusqu'à 10h30, et qui nous refuse de préparer quoi que ce soit alors que nous arrivons à 10h10. On avait qu'à deviner aussi, qu'il leur fallait au moins 30 minutes pour faire des œufs et du bacon, cons de clients que nous sommes...

Nous prenons la route après avoir discuté un moment avec un ado zurichois au service d'infos du parc, ainsi qu'avec quelques autres personnes que nos plaques ont encore interpellé. Mais nous sommes rapidement arrêtés par des travaux sur la route. Une des deux voies est fermée, et le préposé au panneau Stop/Go de l'autre côté a dû décider de finir sa nuit, puisque nous attendons près de 40 minutes, alors que le passage ne doit pas faire plus d'un kilomètre et demi.


Nous nous arrêtons dans un de ces lieux à tout faire pour déjeuner : à tout faire, car au milieu de plus ou moins nulle part, lorsque l'on trouve un bâtiment (le grand chalet de Purden Lake, en l'occurrence), on y trouve généralement camping / RV park, restaurant, épicerie, essence, quand ce n'est pas chambres d'hôtel et magasin de souvenirs... A l'intérieur, les trophées de chasse, sont impressionnants, en particulier un ours debout à côté de la cheminée.

Nous avons droit à nos premières gouttes de pluie (après presque un mois de route, pas de quoi se plaindre) juste avant d'arriver à Prince George. Nous avons tenu le rythme que nous avions fixé, pour pouvoir arriver à temps au rendez-vous de demain matin chez Yamaha, pour changer de pneus et monter des pneus tout-terrain. La ville n'a rien de bien intéressant, elle est même un peu déprimante, malgré le cadre de forêt toujours présent. Tout semble tourner plus ou moins au ralenti, voire pas du tout, ce qui est parfois charmant pour de petits villages, mais qui rend le tout un peu glauque pour une ville de 75'000 habitants. Au motel, il n'y a que nous et des vans remplis de hippies. Nous restons dans la chambre une bonne partie de la soirée, et nous reposons en attendant le lendemain.

A 8h30, j'arrive au garage après avoir déposé Aurore, qui range la chambre pendant que j'attends que les pneus soient montés. Deux heures plus tard, les 3 pneus à changer sont montés (le premier l'avait déjà été à Vancouver). La facture arrive : 4 heures de travail, et près de 400 dollars. Un scandale. Je demande au patron comment il explique cette somme, et il me dit que c'est un forfait, que c'est même encore plus cher pour les Goldwing. Je lui fais remarquer que le forfait n'est pas très bien réfléchi, s'il leur faut moitié moins de temps que ce qu'ils facturent, mais rien à faire, les garagistes font le prix qu'ils veulent ici. J'aurais dû demander un devis avant, je me doutais que ce serait un peu plus cher que la norme, mais profiter à ce point du fait que les gens n'ont pas trop le choix, on ne s'y attendait pas.

Nous parvenons à ne pas trop perdre de temps malgré cette mésaventure, et roulons jusqu'à Houston (toujours la Colombie Britannique, on ne s'est pas télé-transportés au Texas). Nous voulions atteindre Smithers ce soir (la ville, pas le personnage des Simpsons - je dois tout expliquer, vraiment), mais l'endroit est joli et a un camping bien noté, alors nous décidons de nous arrêter là. En allant faire des courses, je rencontre deux Australiens, qui font la route en même temps que nous. Nous discutons quelques minutes, mais je ne veux pas faire attendre Aurore. A mon retour, je croise un homme moustachu d'une cinquantaine d'années, qui promène son chien. Il est "native Americain", et alors que nous échangeons quelques mots, il me raconte qu'il vient de démissionner de son travail. Il faisait partie de ces nombreux travailleurs que nous voyons tous les jours sur les routes, qui doivent être réparées et entretenues chaque été après les rigueurs de l'hiver. Avant-hier, il en a eu assez : il retourne à Kitwanga, le village au début de la Cassiar Highway, où nous allons passer demain. Il est l'héritier du rôle de chef de son peuple, et va rentrer au village pour essayer d'améliorer les conditions de vie des siens, entre deux voyages en Harley. Son histoire est intéressante, et nous restons un moment à discuter.

Lorsque je reviens à notre campement, Aurore est en pleine discussion avec un vieux bonhomme, le mari de la patronne du camping. Il vient faire connaissance, et s'intéresse à notre voyage. Il revient le lendemain matin en nous donnant une enveloppe. Elle contient un chèque au nom d'un de ses amis, qui tient un hôtel sur la Alaska Highway. Il nous raconte que son fils, décédé il y a quelques années, et ce Ben, à qui il veut que nous rendions visite, étaient très proches, et qu'ils avaient fait un voyage du même genre. Le chèque est un cadeau pour nous encourager à aller le rencontrer, et il est accompagné d'un petit papier expliquant la différence entre l'enfer et le paradis, et comment on se retrouve à croupir dans le premier ou à profiter du second. "May the Lord be with you", nous dit-il en partant. Difficile pour nous de ne pas y voir un prosélytisme assez désagréable, qui gâche un peu ce qui nous avait initialement apparu comme un geste touchant et plein de générosité, et qui au fond, n'était certainement pas autre chose. Nous acceptons le chèque, pour ne pas décevoir ce vieux bonhomme, mais nous réservons le droit de ne rien en faire.

Nous roulons vers Kitwanga et le début de la Cassiar, anxieux de nous y frotter. La route est censée passer par des endroits très sauvages, et les distances entre villages vont en augmentant. Le vieil homme nous a dit y avoir croisé de nombreux ours. Pour l'instant, nous n'en avons vu qu'un, qui a traversé la route à toute vitesse, peu avant le Mont Robson. Mais à 300 mètres devant nous, et entre plusieurs voitures, tout ce que nous avons vu, c'est un éclair noir qui s'est engouffré dans la forêt en moins de deux bonds.


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